"So it’s time to say goodbye.
I was never keen on last words."
Quand Protomartyr sort son cinquième album, Ultimate success today, en 2020, je n'avais jamais entendu parler de ce groupe. Découvrir une musique en étant totalement vierge d'informations est le moyen le plus pur, le plus sûr, de la jauger, l'estimer, et finalement la laisser - ou non - prendre sa place dans l'instant, voire dans sa vie. Très vite, Protomartyr prit toute sa place, avec une évidence qui se passa de toute intellectualisation (une évidence littéralement). Je ne cherchai pas à en savoir plus (je n'ai découvert les détails biographiques, discographiques et faits concernant l'album qu'à la rédaction de cet article) et me pris l'urgence, la noirceur, la tension folle, mais aussi le désespoir lucide et la fatigue du disque en plein cœur. La musique de Protomartyr collait parfaitement au moment (pandémie mondiale) et se faisait l'écho du dégoût, de la peur, de la colère ressentis à ce moment-là.
Bien-sûr, les gars viennent de Detroit. Musique lourde, dense, post-tout ce que tu veux... saxo free... et cela explique beaucoup de choses, non ? Les morceaux sont traversés par une rage qui n'éclate jamais vraiment, à quelques exceptions près, et te maintiennent dans un état de tension permanente. La musique te parle, fait jaillir des images, s'impose avec la force de ce qui doit absolument être dit. Et que nous dit Casey, parolier du groupe ? La dégueulasserie de l'époque. Il la vomit pour nous et c'est électrisant.
Il y a urgence à se plonger dans ce maelstrom noir qui va à l'essentiel, en déployant une musique bien plus subtile que l'étiquette post-punk qu'on pourrait lui coller hâtivement. Protomartyr a mis à nu l'époque avec toute la rage inconsolable que cela induit, nous en soulageant par la même occasion. Une catharsis, en somme.