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12 janvier 2008 6 12 /01 /janvier /2008 11:40

Rusty James est un film étrange, signé Coppola, au début des années 80. Sans la date sur la jaquette, les acteurs au casting et quelques éléments propres à cette décennie au combien merdique (la musique est signée par un gars de The Police, heureusement elle est assez discrète, à défaut d'être transcendante, m'enfin qu'attendre d'un membre de ce groupe ?), j'aurais pu croire que c'était un film de jeunesse du réalisateur du Parrain, voire même un film d'école de cinéma, un truc d'ado, fait par un ado, sur les ados.

Pourtant, c'est bien l'homme aux deux palmes d'or qui est au commande et qui rend ce Rusty James hors-norme, véritable ovni - même 25 ans après sa sortie en salles. Matt Dillon y joue le cadet d'une fratrie dont Mickey Rourke est la figure tutélaire, légendaire, l'aîné intouchable, surnommé Motorcycle boy dans son quartier. Mais il a quitté le monde de la rue, des gangs, de la violence et le rôle de leader qu'on lui a assigné, s'est barré en Californie pour revenir ensuite voir son frère. Entre-temps le cadet n'a eu de cesse de vouloir ressembler trait pour trait à son aîné, quitte à perdre sa propre identité. "Un jour, je serai comme lui, j'aurai le même visage" répète-t-il tout le long du film.

Vous l'aurez compris, encore une histoire de frères, de filiation et de passage de témoin, les thèmes de prédilection du cinéaste. Ici la relation entre Dillon et Rourke rappelle vraiment celle de Michael Corleone et de Fredo. Fredo qui aura toujours été à la traîne de son frère. Sauf qu'ici tout est inversé, Dillon joue le cadet, alors que Fredo était l'aîné, et c'est Rourke qui tombera, sous le regard perdu de Dillon, alors que dans Le Parrain II, c'est Fredo, victime expiatoire de son frère.

Le film est donc un prétexte pour explorer ce qui est au centre d'une relation entre frères : le raport à la mère (partie), au père (Dennis Hopper en alccolique, est parfait), les liens du sang. A ses réflexions, Coppola (qui a perdu son frère) y ajoute une maîtrise de la mise en scène qui peut paraître trop claquante, ostentatoire, genre "regardez cette science du cadrage, ça vous en bouche un coin, non ?", mais la force de ses personnages qui déambulent dans la nuit fait oublier tout ça. Et puis, il y a quand même des plans inoubliables comme celui - fixe - où l'on voit, en accéléré, une skyline passer du jour à la nuit. Comme le dit Tom Waits - mais oui, il est au casting, il joue un barman philosophant derrière son zinc - le temps file trop vite.

Vingt-cinq ans après, Rusty James demeure un grand film bizarre, à nul autre pareil, pétri de défauts, et pourtant terriblement attachant et émouvant, dont les images me restent en tête depuis que je l'ai vu. Grande découverte.
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